Le Cube

Il était naturellement distant, loin des autres. Il ne les aimait pas, il n’avait pas besoin d’eux. Sa vie était organisée pour réduire au maximum les contacts avec les autres. Il habitait une jolie petite maison coquette et confortable peuplée de livres, de musique, de films, d’images. Il dessinait des BD, il illustrait des livres pour les enfants. Son talent était qu’il n’avait pas besoin de connaître pour faire. C’en était surprenant.

Misanthrope dans l’âme, il évitait le plus possible les rencontres, les échanges fussent-ils téléphoniques. L’humanité ne lui inspirait que méfiance, dégoût et crainte.

Aussi, s’enfermait-il chez lui, travaillant devant sa baie vitrée, laquelle donnait sur un jardin magnifique, fruit d’années de labeur acharné.

Un jour qu’il se promenait dans la forêt, il est arrivé dans une jolie clairière. De vieux arbres centenaires protégeaient de jeunes pousses. Une source fraîche abreuvait une végétation luxuriante et des animaux paisibles et indifférents.

Il décida de suite de s’y construire un abri. Un endroit serein, secret, un endroit à lui. Un endroit où rien, ni personne ne viendrait troubler sa paisible solitude.

Il y a construit un cube, fort laid mais qui serait rapidement recouvert de lierre, de ronces et de vignes folles.

L’intérieur était fort confortable. Tout y était pensé et réalisé pour vivre en parfaite autonomie. Et le temps a passé, la niche s’était protégée des yeux indiscrets

Un jour, alors qu’il venait se réfugier dans sa retraite pour des vacances bien méritées, il a senti quelque chose, ou plutôt quelqu’un. Un étranger était venu en son absence. Quelqu’un avait osé profaner son paradis, son intimité, son Cube.

Alors, il a mis des pièges pour capturer ou faire fuir l’intrus. Il a pisté.

Souvent, lorsqu’il revenait au Cube, les traces laissées par l’intrus le courrouçaient, l’agaçaient au plus haut point. Sa colère allait grandissant, le poussant à revenir de plus en plus souvent dans son terrier.

N’en pouvant plus, un jour il s’en alla porter plainte auprès de la maréchaussée. Laquelle diligente deux braves gendarmes qui eurent tôt fait de déloger le vagabond squatteur.

Satisfait, il est rentré dans son cube. Heureux d’être de nouveau le seul en ces lieux.

Cependant, cette traque avait semé quelque chose en lui. Un nouveau besoin, il ne savait pas lui donner un nom, mais il savait que c’était là.

Petit à petit le cube, la clairière et le silence commencèrent à lui peser. L’autre présence a commencé à lui manquer. Le refuge lui a paru inhospitalier, vide, sans âme. Il y est venu plus rarement, puis, plus du tout.

 Pour la première fois de sa vie, il avait envie de parler à quelqu’un, de raconter de se raconter, d’écouter, d’être écouté. Pour la première fois de sa vie, il avait besoin d’un ami…

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